jeudi 17 septembre 2009

De Arbatax à l'ile San Pietro

Samedi 29 août – Arbatax – Porto Corallo – 43 milles


Départ d’Arbatax par petite brise contraire, le bateau marche bien sur la mer plate mais nous devons tirer des bords près de la côte. Vers 13h, le vent vire de plus en plus au sud et se renforce, les bords deviennent plus difficiles car la mer se creuse et nous faisons du chemin en plus.
Nous longeons une côte sauvage faite d’une succession de caps et d’anses, le petit ilôt de Quirra nous barre la route et nous devons encore tirer un bord pour le doubler… Il nous reste 7 milles à parcourir.
A ce moment, le vent pivote de 90° en forcissant à 25 nœuds, plein travers. Nous ne prenons pas de ris, je me contente d’ouvrir la grand-voile et de réduire le génois et nous filons vers Porto Corallo à 8 nœuds !

Dimanche 30 août au lundi 31 août – Porto Corallo

Nous séjournons 3 jours dans ce petit port perdu. Nous en profitons pour récupérer de la navigation de la veille, laver le bateau et refaire le plein d’eau. Il n’y a pas grand-chose à visiter, c’est un endroit de vacances avec un camping et un village de vacances non loin de là.
Cependant, la côte est jolie avec de petites plages entrecoupées de zones rocheuses, la campagne est plutôt aride.
Nous tentons de rejoindre une petite ville voisine (Villaputzu) à pied mais c’est trop loin et nous y renonçons. Nous prendrons le bus le lendemain pour visiter ce gros village un peu perdu avec un grand nombre de maisons dont les façades non terminées laissent voir les briques ou les parpaings !

Mardi 1er septembre – Porto Corallo- Villasimius ( 26 milles)

Nos amis Anglais, Liz et Julian de Golden Dawn sont à Cagliari et remontent vers la côte Est. Nous convenons donc d’un endroit pour nous retrouver et ce sera Villasimius, situé environ à mi-chemin entre Porto Corallo et Cagliari.
Le vent est, cette fois-ci , plus favorable et souffle modérément de travers, nous passons entre la côte et l’île Serpentara puis nous doublons le cap Carbonara en passant dans un goulet séparant le cap de l’île Cavoli, gros caillou surmonté d’un phare.
Le vent nous pousse maintenant tandis que nous contournons le cap pour entrer dans la baie de Carbonara et nous distinguons, aux jumelles, Golden Dawn qui est au mouillage au fond de la baie.
L’ancre tombe sur un fond de sable blanc et nous retrouvons nos amis Liz et Julian pour nous raconter nos aventures réciproques.
Golden Dawn a été le premier bateau que nous ayons rencontré. C’était à Gijon, lors de notre première étape l’année dernière…
Cependant, tandis que nous discutons, le bateau commence à rouler et nous nous rendons compte que la houle pénètre dans la baie et rend le mouillage inconfortable. Décision est donc prise de rentrer à la marina toute proche après avoir pris un bon bain et nous reprendrons là-bas nos échanges de bons « tuyaux ».




Mercredi 2 septembre – Villasimius-Cagliari ( 22 milles)

Le vent est encore avec nous aujourd’hui et souffle trois quarts arrière à 12 nœuds lorsque nous quittons, sans regrets, cette marina artificielle après avoir dit au-revoir à nos amis Anglais.
Nous filons donc rapidement, d’autant plus que ce vent se renforce et atteint 25 à 28 nœuds établis vers midi. Nous partons parfois au surf sur les vagues, c’est le bonheur, on en redemande !
Puis c’est l’arrivée dans le grand port de Cagliari, d’où sortent et entrent cargos et autres énormes porte-containers … Nous nous rendons à la marina de Sant’Elmo car nous avons l’intention de nous renseigner sur les conditions d’hivernage.

Jeudi 3 septembre au Samedi 5 septembre - Cagliari

La capitale Sarde est une ville très animée, avec une circulation d’enfer mais c’est aussi une très belle cité avec le vieux quartier du château qui est en fait une véritable citadelle avec ses remparts, ses tours, ses portes , ses ruelles . Au sommet, une jolie esplanade offre une vue imprenable sur la ville et sur la mer.
Il est aussi agréable de se promener dans les vieux quartiers cosmopolites et colorés où l’on trouve de petites églises insérées dans les rangées de maisons.
La ville fut fondée par les phéniciens au VIè siècle avant JC puis fut occupée par les Romains et fut fortifiée par les Pisans au moyen-âge. Ceux-ci construisirent les plus beaux édifices dont la cathédrale et les tours de l’éléphant et de San Pancrazio. Elle fut ensuite conquise par les Aragonais au 13è siècle.
Aujourd’hui, c’est une métropole moderne dotée d’un aéroport et d’un important port de commerce.
Nous profitons de notre passage ici pour rendre visite à nos amis Vannetais de Dam’Marine qui est amarré dans un petit port juste devant la ville. Loulou et Dominique ont décidé d’y passer l’hiver et se sont installés.
Nous avons hésité, la marina de Sant’Elmo est bien, un peu chère, mais le principal problème, c’est que l’on ne peut pas travailler sur le bateau lorsqu’il est à terre. Il faut faire effectuer tous les travaux par les professionnels locaux, ce qui est hors de question … De plus, l’eau du port est sale, très très sale ! Alors nous choisissons Arbatax …

Dimanche 6 septembre- Cagliari – Baie de Malfatano ( 35 milles )

Avant de remonter sur Arbatax, nous poursuivons notre route vers le sud/sud-ouest. Le grand port de Cagliari est laissé dans notre sillage par bon vent de Nord-ouest qui nous pousse agréablement.
Nous faisons ainsi route en croisant quelques pétroliers qui viennent au terminal situé en-dessous de la ville.
D’un seul coup, le vent tourne de 180° et vient du sud-est, nous obligeant à naviguer au plus près mais sur un bord favorable à notre route. Au moment de doubler le Capo di Pula, là où se trouvent les ruines d’une ville de la période Nuraghique, le vent passe subitement au sud-ouest et nous devons cette fois tirer un bord vers le large pour doubler le cap.
Le vent se met à fraîchir 25/30 nœuds, levant une mer courte et dure, cela devient un peu la galère. Le bateau devient un sous-marin, l’eau submerge tout l’avant quand il traverse la vague, nous avançons difficilement avec la grand-voile à 2 ris, génois réduit dans le sifflement rageur du vent et la route devient longue … Je me souviendrai de la journée de mes 60 ans !
Finalement, après avoir bien tapé et fait du saute-moutons, nous sommes en vue de l’entrée de la baie de Malfatano, l’abri tant souhaité ! Nous mettons le moteur pour franchir les 3 derniers milles qui nous en séparent et parvenons finalement dans ce joli havre où la mer redevient plate.
L’ancre est jetée dans une eau transparente par 5 mètres sur fond de sable et posidonies, elle croche immédiatement dans le sable et nous voilà tranquilles ! D’ailleurs le vent diminue et deviendra nul à la tombée de la nuit.
Nous avions lu que le golfe de Cagliari est réputé pour être très venté, mais plus que le vent, c’est surtout l’état de la mer qui nous a impressionnés.
Sur le téléphone, un message des parents qui me souhaitent un bon anniversaire… Ils pensaient que nous étions en train de le fêter et de nous amuser !

Lundi 7 septembre – Baie de Malfatano

Nous restons une journée dans ce superbe mouillage entouré de montagnes… Au programme : baignade, grattage de la coque pour enlever les sortes de petites berniques, mise en place d’une latte manquante dans la grand-voile et longue promenade le long de la côte aux rochers déchiquetés dont certains sont faits d’une roche tendre qui brille doucement au soleil.
Le soir, près du bateau, un pêcheur vient relever son filet qu’il avait posé le matin… Belle image paisible dans la lumière de fin d’après-midi…

Mardi 8 septembre – Malfatano – Ponte Romano – 31 milles

Après avoir doublé le cap qui garde l’entrée Ouest de la baie de Malfatano, nous mettons le cap sur Teulada, petit port distant de seulement 6 milles où existe une possibilité de mouillage et de ravitaillement.
En arrivant à proximité, le mouillage nous parait très exposé au clapot qui règne en ce moment, aussi nous faisons demi-tour et remontons le vent pour entrer dans le grand golfe Di Palmas, délimité par l’île San Antioco à l’ouest et le « continent » Sarde à l’est. L’île est d’ailleurs reliée au continent par une chaussée commencée par les Phéniciens et terminée par les Romains.
Ponte Romano se trouve au fond de ce golfe, près de la fameuse chaussée et est entouré de salines. Nous distinguons d’ailleurs au loin les formes blanches qui sont des tas de sel.
Après avoir embouqué l’étroit chenal d’entrée, nous pénétrons dans le port où il n’y a que des grands quais manifestement conçus pour recevoir des gros bateaux. Le guide précisant que l’on peut s’amarrer sur l’un de ces quais, nous nous approchons et tentons un amarrage mais un homme en uniforme blanc nous prie de « dégager », vous et votre bateau nous dit-il en Anglais et d’aller voir sur un quai de l’autre côté.
Nous obtempérons donc devant l’air vindicatif de ce fonctionnaire zélé et nous nous rendons de l’autre côté de grands bâtiments pour découvrir sur tribord un grand quai rempli de bateaux de pêche et sur bâbord, une zone avec un quai carburant et quelques endroits déjà occupés par des bateaux.
Nous finissons par trouver une petite niche au bout du quai tribord, devant les bateaux de pêche, nous pouvons rester là…
L’endroit n’est pas idéal et fait un peu « zone », les grands bâtiments voisins sont abandonnés et ce n’est pas très propre. Néanmoins, nous sommes peu éloignés de la ville de San Antioco et nous resterons quelques temps si on ne nous déloge pas !

Mercredi 9 septembre au Vendredi 11 septembre - Ponte Romano/San Antioco

En milieu de journée de mercredi, un violent orage s’abat sur Ponte Romano, avec beaucoup de pluie, puis le calme revient et nous pouvons entreprendre la visite de San Antioco distante de 2 kms environ.
C’est une ville très ancienne, qui s’appelait Sulcis au temps de la première colonie Carthaginoise, et qui revendique d’avoir été toujours peuplée depuis 2600 ans, il faut aller un peu à l’extérieur pour trouver des restes des temps anciens.
Nous irons visiter ces lieux où est reconstitué un antique village enterré et où ont été mis au jour une nécropole punique et des restes d’une antique civilisation.
Les rues de la ville parfois en forte pente, conservent quelque vieilles façades et l’on peut admirer de beaux édifices dont la Basilique San Antioco qui est par ailleurs le patron de la Sardaigne.

Samedi 12 septembre – Ponte Romano – Carlo Forte – 22 milles

Navigation tranquille, en partie au moteur, en direction de l’île de San Pietro. Nous entrons dans le port de Carlo Forte en début d’après-midi. Nous avions prévu d’aller au quai municipal (gratuit), mais celui-ci est occupé par des bateaux à passagers, nous devons donc nous rabattre sur l’une des marinas.
Nous resterons là le dimanche et en profiterons pour visiter cette très jolie ville colorée avec sa belle promenade en bord de mer ornée de palmiers et de belles maisons aux façades travaillées.



Nous montons ensuite vers la ceinture de remparts puis c’est le dédale de ruelles en pente entrecoupées d’escaliers, et toujours ces maisons de couleur pastel avec de jolis balcons sculptés et souvent des ouvertures arrondies.
Le soir, nous remarquons un bateau Français amarré au quai. Nous avons déjà rencontré Marc et Catherine qui voyagent à bord de « Passager du vent », un Cigale16 en aluminium. C’était à Chipiona, en avril, avant de repartir pour la nouvelle saison.
Nous passons un bon moment à bord à nous raconter nos aventures respectives… Le bateau va hiverner ici, à Carlo Forte.

Lundi 14 septembre – Carlo Forte – Calasetta – 5 milles

La navigation fut très courte mais très mouvementée ! En effet, nous quittons Carlo Forte en fin de matinée pour retourner sur l’île de San Antioco. Nous devons aller vers un mouillage situé près de Calasetta, au nord de l’île.
En quittant le port, nous voyons au loin le ciel s’assombrir, il y a un bon vent portant et nous déroulons seulement le génois, cela avance bien et le trajet promet d’être court. Cependant les gros nuages noirs gagnent du terrain et nous rattrapent, le ciel devient couleur d’encre et les éclairs commencent à zébrer le ciel … Voyant ce mauvais temps qui arrive, nous décidons d’aller au port de Calasetta qui n’est plus distant maintenant que d’un demi-mille.
Nous voyons parfaitement l’entrée et la grosse bouée cardinale Nord qui balise les haut-fonds voisins…
A ce moment, un orage violent se déclenche, accompagné d’une pluie diluvienne et de fortes rafales de vent. Je ne vois plus l’entrée du port et pour tout dire, je ne vois plus rien du tout, le rideau de pluie étant tellement intense ! Heureusement que nous avons enroulé le génois.
Je fais demi-tour et, à sec de toile, le moteur aidant, j’essaie de rester à l’estime dans une zone où je suis sûr de trouver de l’eau car nous sommes dans de faibles profondeurs tout autour. Nous ne pouvons même pas fuir sous le vent car la côte est toute proche. J’ai également arrêté tous les instruments pour éviter de les griller par l’orage…
Le bateau gîte fort sous les rafales à plus de 50 nœuds et nous ne voyons toujours rien… Dans une trouée, j’aperçois la bouée cardinale au sud, qui m’indique que nous restons dans le bon secteur, puis cela se rebouche de plus belle, les éclairs sillonnent le ciel, la grêle à l’horizontale nous cingle le visage et nous continuons à errer devant cette entrée de port sans pouvoir y aller !
Finalement l’orage passe, le calme revient, et avec soulagement, nous pouvons entrer dans ce port de Calasetta , «trempés- guennés » ! Que d’émotions…